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Том 7. 4 марта 1966
03.02.2023, 15:15

1966.03.04 (1)

1966.03.04 (2)

 

(Mère reprend ses commentaires sur les Aphorismes de Sri Aurobindo.)

115 – Le monde est une fraction périodique qui se répète indéfiniment, avec le Brahman pour nombre entier. La période semble commencer et finir, mais la fraction est éternelle: elle n'aura jamais de fin et n'a jamais eu vraiment de commencement.

 

 

La semaine dernière encore, il y a eu tout un développement de cette expérience.

Au fond, c'est la même chose pour les mondes que pour les individus et pour les univers que pour les mondes. C'est seulement la durée qui diffère: un individu, c'est tout petit; un monde, c'est un peu plus grand; et un univers, c'est encore un peu plus grand! Mais ce qui commence finit

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Théon disait (je crois que je t'en ai déjà parlé) que c'est la septième création universelle: qu'il y a eu six pralaya avant et que c'est la septième création, mais que celle-ci pourra se transformer sans se résorber – ce qui n'a évidemment aucune espèce d'importance parce que, dès que l’on a la conscience éternelle, ça peut être comme ceci, ça peut être comme cela, cela n'a aucune importance. C'est pour la conscience humaine limitée qu'il y a cette espèce d'ambition ou de besoin de quelque chose qui ne finisse pas, parce qu'il y a, au-dedans, ce que l’on pourrait appeler «le souvenir de l’éternité» et que ce souvenir de l’éternité aspire à ce que la manifestation participe à cette éternité. Mais si ce sens de l’éternité est actif et présent, on ne se lamente pas – on ne se lamente pas parce que l’on rejette un habit abîmé, n'est-ce pas (on peut être attaché, mais enfin on ne se lamente pas). C'est la même chose: si un univers disparaît, cela veut dire qu'il a rempli sa fonction pleinement, qu'il est arrivé au bout de ses possibilités et qu'un autre doit le remplacer.

J'ai suivi la courbe. Quand on est tout petit dans la conscience et dans le développement, on sent un grand besoin que la terre ne disparaisse pas, qu'elle se perpétue (en se transformant tant que l’on veut, mais que ce soit toujours la terre qui se perpétue). Un peu plus tard, quand on est un peu plus... mûr, on y attache beaucoup moins d'importance. Et quand on est en constante communion avec le sens de l’éternité, cela ne devient plus qu'une question de choix; ce n'est plus un besoin, parce que c'est quelque chose qui n'affecte pas la conscience active. Il y a quelques jours (je ne sais plus quand, mais tout dernièrement), pendant toute une matinée, j'ai vécu cette Conscience et j'ai vu, dans la courbe du développement de l’être, que cette espèce de besoin, qui paraît un besoin intime, de la prolongation de la vie de la terre – la prolongation indéfinie de la vie de la terre –, ce besoin s'objective pour ainsi dire, il n'est plus si intime; c'est comme lorsqu'on regarde un spectacle et que l’on juge s'il doit être comme ceci ou s'il doit être comme cela. C'était intéressant comme changement de point de vue.

C'est comme un artiste, mais un artiste qui se façonnerait lui-même, et qui ferait un essai, deux essais, trois essais, autant d'essais qu'il faut, puis qui arriverait à quelque chose d'assez complet en soi et d'assez réceptif pour pouvoir s'adapter à de nouvelles manifestations, aux besoins des nouvelles manifestations, de telle sorte qu'il ne serait pas nécessaire de tout rentrer pour tout remélanger et tout ressortir. Mais ce n'est plus que cela et, comme je dis, une question de choix. N'est-ce pas, la manifestation est faite pour la joie de l’objectivation (la joie ou l’intérêt, ou... enfin), et quand ce qui a été façonné est assez plastique, assez réceptif, assez souple et assez vaste pour pouvoir constamment être moulé par les nouvelles forces qui se manifestent, il n'est plus besoin de tout défaire pour tout refaire.

La courbe se présentait aussi avec un adage: «Ce qui commence doit finir»... Cela paraît être l’une de ces constructions mentales humaines qui ne sont pas nécessairement vraies.

Mais subjectivement, ce qui est intéressant, c'est que le problème perd de son acuité à mesure qu'on le regarde de plus haut (ou d'un point plus central, pour dire la vérité).

Il semble que ce soit le même – pas «principe» parce que ce n'est pas un principe –, la même loi pour l’individu, pour les mondes et pour les univers.

(long silence)

Dès que l’on essaye d'exprimer (Mère fait un geste de renversement), tout se fausse... Je regardais cette expérience de la relation avec la Conscience et le Tout: cette relation de l’être humain avec le Tout; de la terre (la conscience de la terre) avec le Tout; de la conscience de l’univers manifesté avec le Tout; et de la conscience qui préside à l’univers – à tous les univers – avec le Tout; et ce phénomène inexprimable que chaque point de conscience (un point qui n'occupe pas d'espace), chaque point de conscience est capable de TOUTES les expériences... C'est très difficile à dire.

On pourrait dire que ce sont seulement les limites qui font les différences: les différences de temps, les différences d'espace, les différences de grandeur, les différences de puissance. Ce sont seulement les limites. Et du moment où la conscience sort des limites, sur n'importe quel point de la manifestation et quelle que soit la dimension de cette manifestation (oui, la dimension de cette manifestation est absolument sans importance), sur n'importe quel point de la manifestation, si l’on sort des limites, c'est LA Conscience.

Vu sous cet angle, on pourrait dire que c'est l’acceptation des limites qui a permis la manifestation. La possibilité de la manifestation est venue avec l’acceptation du sens de la limite... C'est impossible à dire. Toujours, dès que l’on se met à parler, on a l’impression de quelque chose qui fait comme cela (même geste de renversement), une sorte de bascule, et puis c'est fini, l’essentiel s'en va. Alors le sens métaphysique vient et dit: «On pourrait dire comme cela, on pourrait dire comme ceci»... Pour faire des phrases: tout point contient la Conscience de l’Infini et de l’Éternité (ce sont des mots, rien que des mots). Mais la possibilité de l’expérience est là. C'est une sorte de recul en dehors de l’espace... On pourrait s'amuser à dire que même la pierre, même... – oh! l’eau certainement, le feu certainement – a le pouvoir de la Conscience: la Conscience (tous les mots qui viennent sont idiots!) originelle, essentielle, primordiale (tout cela ne veut rien dire), éternelle, infinie... Cela ne veut rien dire, cela me fait l’effet de poussières que l’on jette sur un verre pour l’empêcher d'être transparent!... Enfin, conclusion, après avoir vécu cette expérience-là (je l’ai eue ces jours-ci d'une façon répétée, elle restait là souverainement en dépit de tout – travail, activités –, elle présidait à tout): tout attachement à n'importe quelle formule, même celles qui ont remué les peuples pour des âges, me paraît un enfantillage. Et alors ce n'est plus qu'un choix: on choisit que ce soit comme cela ou comme cela ou comme cela; on dit ça ou ça ou ça – amusez-vous, mes enfants... si cela vous amuse.

Mais il est certain (c'est une constatation à l’usage courant), il est certain que le mental humain, pour avoir l’impulsion à agir, a besoin de se construire une demeure – plus ou moins grande, plus ou moins complète, plus ou moins souple, mais il a besoin d'une demeure. Seulement (riant), ce n'est pas cela! ça fausse tout!

Et ce qui est étrange – ce qui est étrange –, c'est qu'extérieurement, on continue à vivre automatiquement selon certains modes de vie (qui n'ont même plus la vertu de vous paraître nécessaires, qui n'ont même plus la force d'être des habitudes) et qui sont acceptés et vécus presque automatiquement avec le sens (une espèce de sentiment, de sensation, mais ce n'est ni sentiment ni sensation, c'est une sorte de perception très subtile) que Quelque chose, de tellement immense que c'est indéfinissable, le veut. Je dis le «veut» ou je dis le «choisit», mais c'est «le veut»; c'est une Volonté qui ne fonctionne pas comme la volonté humaine, mais qui le veut – qui le veut ou qui le voit ou qui le décide. Et dans chaque chose, il y a cette Vibration lumineuse, dorée, imperative... qui est nécessairement toute-puissante. Et cela donne un arrière-fond de bien-être parfait de la Certitude, qui se traduit, un petit peu plus bas dans la conscience, par un sourire bienveillant et amusé.

J'aurais envie de te poser une question. Un peu plus loin, Sri Aurobindo parle des mondes qui n'ont ni commencement ni fin et il dit que leur création et leur destruction sont un «jeu de cache-cache avec notre conscience extérieure»...

C'est certainement une façon très élégante de dire la même chose que ce que je viens de dire!

Ce que je voulais demander, c'est si, de l’autre côté, le monde matériel continue à être perçu d'une façon claire, ou bien si tout cela s'évapore... autant que de ce côté-ci, l’autre monde semble s'évaporer?

(silence)

Le jeu est intéressant si l’on est conscient des deux côtés.

C'est encore une expérience de ces jours derniers. Il m'est venu d'une façon certaine et absolue (quoique très difficile à exprimer) que cette prétendue «erreur» du monde matériel tel qu'il est, était indispensable pour ce que tu viens de dire; c'est-à-dire que le mode matériel ou la manière matérielle de percevoir, de devenir conscient des choses, ce mode a été gagné par «l’erreur» de cette création et n'aurait pas existé sans elle, et que ce n'est pas quelque chose qui s'évanouira dans la non-existence quand on aura la vraie conscience – c'est quelque chose qui S'AJOUTE d'une façon spéciale (qui a été perçu, qui a été vécu à ce moment-là dans la Conscience essentielle).

C'était comme une justification de la création qui a rendu possible un certain mode de perception (que l’on pourrait décrire par les mots «précision», «exactitude» dans l’objectivation), qui n'aurait pas pu exister sans cela. Parce que, au moment où cette Conscience – la Conscience parfaite, la Conscience vraie, LA Conscience – était là, présente et vécue à l’exclusion de toute autre, il y avait un «quelque chose», comme un mode vibratoire, peut-on dire, un mode vibratoire de précision et d'exactitude objectives, qui n'aurait pas pu exister sans cette forme matérielle de création... N'est-ce pas, il y avait toujours ce grand «Pourquoi» – le grand «Pourquoi comme cela?» «Pourquoi tout cela?» qui a eu pour résultat ce qui se traduit dans la conscience humaine par la souffrance et la misère et l’impuissance, et tout-toutes les horreurs de la conscience ordinaire – pourquoi? pourquoi cela? Et alors, la réponse était ainsi: dans la Conscience vraie, il y a un mode vibratoire de précision, d'exactitude, de netteté dans l’objectivation, qui n'aurait pas pu exister sans cela, qui n'aurait pas eu l’occasion de se manifester. C'est sûr. C'est la réponse – la réponse toute-puissante au «pourquoi».

Il est évident – évident – que ce qui se traduit pour nous par le progrès, par une manifestation progressive, n'est pas seulement une loi de la manifestation matérielle telle que nous la connaissons, mais que c'est le principe même de la Manifestation éternelle. Si l’on veut redescendre au niveau de la pensée terrestre, on peut dire qu'il n'y a pas de manifestation sans progrès. Mais ce que NOUS appelons progrès, ce qui pour notre conscience est «progrès», là-haut, c'est... ce peut être n'importe quoi: une nécessité, tout ce que l’on veut. Il y a une sorte d'absolu que nous ne comprenons pas, un absolu d'être: c'est comme cela parce que c'est comme cela, voilà. Mais pour notre conscience, c'est de plus en plus, de mieux en mieux (et ces mots sont idiots), c'est de plus en plus parfait, de mieux en mieux perçu. C'est le principe même de la manifestation.

Et il y a une expérience, qui est venue d'une façon très fugitive mais suffisamment précise pour permettre de dire (très maladroitement) que – j'allais dire la «saveur» du Non-manifesté –, que le Non-manifesté a une saveur spéciale à cause du manifesté.

Tout cela, ce sont des mots, mais c'est tout ce que nous possédons. Peut-être, un jour, aurons-nous des mots et une langue qui pourront dire ces choses convenablement, c'est possible, mais ce sera toujours une traduction.

Il y a là, un niveau (geste à hauteur de poitrine) où quelque chose joue avec les mots, les images, les phrases, comme cela (geste chatoyant, onduleux): ça fait de jolies images; et cela a un pouvoir de vous mettre en rapport avec «la chose», peut-être plus grand (au moins aussi grand, mais peut-être plus grand) qu'ici (geste au sommet du front), l’expression métaphysique («métaphysique» est une façon de parler). Les images. C'est-à-dire la poésie. Il y a là un accès presque plus direct à cette Vibration inexprimable. Je vois l’expression de Sri Aurobindo dans sa forme poétique, elle a un charme et une simplicité – une simplicité et une douceur et un charme pénétrant – qui vous met en rapport direct beaucoup plus intimement que toutes ces choses de la tête.

Voilà. Alors au fond on n'a rien fait (riant), on a perdu son temps!

(silence)

C'est vraiment intéressant comme toutes ces expériences se produisent. Je me disais ces jours-ci: «Pourquoi cela vient-il comme cela? Quelle est la loi qui préside à l’ordre de ces expériences?» (qui viennent tout d'un coup – je vois, ça vient du dehors: ça ne vient pas du dedans, ça vient comme une vague). Et il y a toujours cette Force dorée, souriante, derrière tout. Même quand cela se traduit physiquement par quelque chose qui n'est pas très agréable, ça sourit toujours, et ça dit: «Allons! ne fais pas de manières.» Mais c'est contagieux, on sourit... N'est-ce pas, pour le corps, dès qu'il y a quelque chose, une vibration à laquelle il n'est pas habitué, le premier contact est un malaise! et il faut qu'on lui dise: «Tiens-toi tranquille, n'aie pas peur, tout ira bien...» C'est drôle, nous sommes de toutes petites choses – toutes pauvres petites choses. Mais il faut rire.

Voilà, mon petit. Et tu es très étroitement associé à ces expériences, même dans ton corps physique, et plusieurs fois ces jours-ci, j'ai eu l’occasion de te dire: «Tu vois, ne t'inquiète pas.» Ces choses-là sont vraiment des apparences, que la pensée humaine cristallise et durcit, mais si on les voit avec la fluidité de la vraie conscience, ça vient, ça va, ça passe – et ça peut ne pas laisser de trace, si nous sommes assez souples pour pouvoir nous adapter. C'est comme cela. Être souple et plastique pour pouvoir s'adapter à toutes ces vibrations qui entrent et dérangent le fonctionnement soi-disant «naturel». C'est la stupidité de cette pensée (une pensée subconsciente habituelle) quand quelque chose change; c'est cela qui gâte tout.

 

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Категория: Том 7 аудио | Добавил: Irik
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