эволюционная трансформация человека

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Том 2. 4 марта 1961
11.02.2017, 10:52
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1961.03.04

 

(Mère donne un pétunia mauve échevelé:)

Regarde, c’est de l’enthousiasme, tu vois! Il est beau. Il faut le mettre tout de suite dans l’eau, autrement... Il a besoin de force vitale – l’eau, c’est la force vitale. C’est joli! Quelle fantaisie! Et puis ça [hibiscus rose pâle, double], c’est la conscience «une» avec la conscience divine, mais c’est supramentalisé – ça commence à se supramentaliser. Et voilà une très jolie promesse de réalisation [capucine], elle est jolie, avec... de l’équilibre [bégonia] – l’équilibre. Et la paix de la fidélité [portlandia ou quisqualis].

Voilà, mon petit.

Alors, quelque chose à demander?

(silence)

Oh! c’est effroyable, chacun... (Mère veut parler des disciples)... Enfin tant pis. Je ne suis pas venue si tard. Qu’est-ce que tu as à me dire?

Dire?

Dire, travailler, faire, décider, arranger, n’importe quoi!

Un jour, quand tu auras le temps, je te poserai une question.

Pose.

Ce n’est pas une question personnelle mais quelque chose qui m’a troublé un peu. C’est au sujet de World-Union...

Oh! World-Union... Qu’est-ce qui te trouble?

Écoute, mon petit, tu n’as pas besoin de poser de questions, je vais te dire tout de suite: Sri Aurobindo a écrit quelque part que le mouvement de transformation du monde est double: d’abord, l’individu qui fait la sâdhanâ et qui établit le contact avec les choses supérieures; mais en même temps, le monde est une base et il faut que le monde se soulève un peu et se prépare pour que la réalisation puisse s’accomplir (enfin c’est une façon de dire, pour simplifier). Il y a des gens qui n’existent que comme cela, en surface – tu comprends, ils ne vivent que quand ils s’agitent: tout ce qui se passe au-dedans d’eux (s’il se passe quelque chose!) se traduit tout de suite par de l’agitation. Et alors ces gens-là, comme J, par exemple, pour ne pas le nommer, ont toujours besoin de se livrer à une action extérieure. Il a donc ramassé cette phrase de Sri Aurobindo [World-Union, l’Union du Monde] et il est venu me dire qu’il voulait...

Mais depuis le commencement il est comme cela (geste exprimant l’agitation), il a essayé... il a essayé un nombre considérable de choses! D’ailleurs il n’a jamais rien réussi: il n’a pas de méthode, il n’a pas d’ordre, il ne sait pas organiser un travail. Alors ce World-Union, c’est simplement pour le laisser, comme on laisse un cheval galoper.

Il se trouve qu’une fois, quand il faisait ses tournées (je l’envoyais visiter les centres – parce qu’il fallait bien qu’il fasse quelque chose! alors il visitait, il leur parlait... je ne sais pas de quoi), mais un jour, au cours de l’un de ses voyages, à Delhi, il a rencontré Z qui avait été envoyé par le gouvernement de l’Inde chez les Soviets; et là, Z a, paraît-il, fait un discours extraordinaire (ce doit être extraordinaire parce que je reçois des lettres de partout, y compris d’Amérique, me demandant le texte de ce discours qui a fait sensation). Cet homme est donc revenu avec l’idée qu’on pourrait faire un «World-Union» (il a parlé de «l’unité humaine» dans son discours paraît-il). Et ces deux-là, J et Z se sont rencontrés. En outre, ils étaient encouragés par S.M. et même par le Premier Ministre qui, probablement, avait une sympathie spéciale pour Z et l’avait beaucoup encouragé. C’est comme cela que les choses ont commencé.

Et je traitais cela comme une chose tout à fait secondaire et sans importance – je laisse les gens galoper quand ils ont besoin de galoper (mais je ne connaissais pas Z). Ils sont donc partis ensemble, J et Z, faire une tournée en Afrique. Là, les choses ont commencé à se gâter parce que Z faisait d’une façon et J d’une autre; finalement ils se sont plus ou moins querellés et ils sont revenus pour me dire: «Ce World-Union commence bien: par une dispute!» (Mère rit) Z disait: «Rien ne peut se faire à moins que l’on ne se base EXCLUSIVEMENT sur l’enseignement de Sri Aurobindo et de Mère et qu’ils soient derrière nous pour nous soutenir.» L’autre disait: «Non-non! Nous ne sommes pas sectaires! Nous admettons toutes les idées et toutes les théories, etc.» Bon, j’ai répondu, et il se trouve que j’ai donné raison à Z, avec un correctif cependant parce que, lui, disait qu’il fallait que les gens nous reconnaissent comme leur gourou – j’ai dit: «Non, c’est absolument inutile. Non seulement inutile mais je refuse; je ne veux pas du tout être le gourou de qui que ce soit. Seulement il faut que les gens sachent que c’est sur cette base de pensée [l’enseignement de Sri Aurobindo] que les choses doivent se faire.» Bien.

Alors chacun a tiré de son côté. Enfin, ils ont essayé de faire quelque chose (qui d’ailleurs ne tenait pas debout), et finalement ils m’ont écrit un peu clairement (il y a un homme là-dedans qui est très gentil, c’est Y: ce n’est pas un homme très intellectuel mais il a beaucoup de bon sens et un cœur très fidèle; enfin c’est un homme très bien). Alors Y m’a posé des questions directes, sans emberlifi-cotage. J’ai répondu directement; j’ai dit: «World-Union est une chose tout à fait de surface, qui n’a pas de profondeur, qui est basé sur le fait que Sri Aurobindo a dit qu’il fallait aider «la masse» à suivre le mouvement de «l’élite» – eh bien, qu’ils y aillent! Si ça les amuse, qu’ils y aillent!»... Je n’ai pas dit les choses exactement comme cela; je les ai dites un peu plus poliment (!) mais c’est cela que j’ai dit.

Alors tout est tombé à plat. Ils continuent leurs petites affaires mais cela n’a absolument aucune importance. Ils ont un petit journal (V qui écrit pour eux est loin d’être bête. C’est une personne assez intelligente et sur laquelle j’ai un certain contrôle: je vais l’empêcher d’écrire des bêtises).

Ils voulaient aussi (tout d’un coup, ils ont eu une idée de génie!) ils voulaient s’affilier à Sri Aurobindo Society. Mais Sri Aurobindo Society n’a absolument rien à voir avec cela; c’est une chose tout à fait extérieure, organisée par des hommes d’affaires et pour rapporter de l’argent – ex-clu-si-vement. C’est-à-dire qu’ils veulent mettre les gens dans la situation où ils seront obligés de donner (et jusqu’à présent ils ont réussi et je pense qu’ils réussiront). Mais cela n’a rien à voir avec une œuvre idéale: c’est TOUT À FAIT pratique. Et naturellement, eux, World-Union, n’avaient rien à apporter à Sri Aurobindo Society, ils pouvaient simplement sucer de l’argent. Alors je leur ai dit: «Rien à faire, vous n’en êtes pas!»

Mais ils m’ont dit: «Votre nom est là comme Présidente de Sri Aurobindo Society» – Mon nom est là pour donner une garantie tout à fait matérielle que l’argent donné sera utilisé vraiment, réellement, pour l’Œuvre à accomplir et pas pour autre chose; c’est une garantie morale et purement pratique, pas autre chose. Ce sont des gens à qui l’on ne demande même pas de comprendre ce que Sri Aurobindo a dit: on leur demande simplement de participer. Les autres du World-Union, c’est une autre affaire: ils se placent sur un plan tout à fait idéal, ils veulent préparer le monde à recevoir (riant) le Supramental! – Qu’ils le préparent! Ça ne fait rien, ils ne feront rien du tout, ou très peu. Ça n’a pas d’importance. Voilà mon point de vue. Et je le leur ai dit.

Je leur ai dit, d’ailleurs, qu’il était préférable qu’ils ne fassent rien ici – qu’ils fassent cela à Tapogiri, dans l’Himalaya, ou ailleurs. Et c’est entendu. Il y a eu un «séminaire» ici (qui d’ailleurs était un parfait fiasco), mais c’était arrangé avant, depuis longtemps: ils avaient invité des gens qui avaient promis de venir (je crois d’ailleurs qu’il y en avait très peu), et cela n’a qu’une importance tout à fait secondaire. Mais je leur ai dit: «C’est la dernière fois: ici, plus. À Tapogiri, tant que vous voudrez: c’est un très bel endroit, c’est sur la montagne, c’est très joli, on y va en été, on fait une cure de grand air et... on échange quelques balivernes»!

Ce qui m’avait choqué... Tu sais que je sors très peu de chez moi, mais chaque fois que je venais à l’Ashram pour un darshan ou pour te voir, toujours, comme par hasard, je trouvais J dans un coin avec un visiteur européen. La répétition de cette coïncidence m’a fait réfléchir. Je me suis dit: mais qu’est-ce qu’il fait avec TOUS les Européens visiteurs, systématiquement?! Et cela m’a choqué parce que je me suis mis par l’imagination à la place de ces visiteurs et je me suis dit: suppose que, toi, tu viennes pour la première fois à l’Ashram, très ouvert, à la recherche d’une grande vérité, et tu tombes sur ce Monsieur qui te dit: Sri Aurobindo = World Union. Eh bien, ma première réaction serait de dire: «Je m’en vais, ça ne m’intéresse pas.»

C’est un test, mon petit, c’est un très bon test! Il y a beaucoup de choses comme cela...

Tu sais qu’il y a une personne ici, Mridou, que tu connais (le tonneau!), c’est une personne qui raconte à tout le monde... (pendant très longtemps elle avait une clientèle parce qu’elle préparait des sucreries indiennes et les Européens allaient chez elle pour goûter), c’est une femme qui, quand il n’y a pas de potins, en invente! Toutes les ordures que l’on peut dire, elle les dit à tous les gens qui viennent. On m’a signalé le fait. Je me souviens, autrefois, Sir Akbar qui venait de Hyderabad m’avait prévenue; il m’a dit: «Vous savez, c’est la seconde Mère de l’Ashram, faites attention!» J’ai répondu: «C’est un bon test: les gens qui n’ont pas imédiatement le sentiment de ce que c’est ne sont pas dignes de venir ici.»

Eh bien, J, c’est la même chose – au point de vue intellectuel c’est la même chose, la même chose: les gens qui sont pris par ça, cela veut dire qu’ils ne sont pas prêts DU TOUT.

Mais le danger, ce n’est pas d’être «pris» par ça: c’est d’être dégoûté!

Dégoûté? Mais c’est la même chose!

On dira: Sri Aurobindo, c’est donc ça!

Alors cela prouve qu’ils n’ont jamais rien lu de Sri Aurobindo. Aucune importance. Non, c’est même mieux qu’aucune importance: c’est un test.

Nous sommes pleins de tests ici, pleins-pleins-pleins! Les gens ne savent pas...

Et tu sais, on voit: c’est comme si c’était mis exprès pour faire broncher les gens (ce n’est pas mis «exprès», mais c’est comme ça). Et cela me protège d’un tas d’inutiles! Je ne tiens pas à avoir beaucoup de monde.

Une autre chose m’avait choqué dans leur journal...

Je ne l’ai jamais vu – plein d’âneries?

C’est effarant! D’abord ils se servent du nom de Sri Aurobindo, puis ils le mettent sur le même plan que Vinoba Bhave et le Dr. Schweitzer ou je ne sais quel autre plus ou moins sage. Et à la fin, on lance un appel aux gens pour qu’ils «s’enrôlent»!... Alors on se dit: «Tout de même, Sri Aurobindo...» Tu comprends, ce mélange de plans, ce rapetissage.

Je leur ai écrit une lettre dans laquelle je leur ai mis le nez dans leur bêtise.

Écoute cet appel: «Si la chance offerte par ce mouvement vous attire, si vous avez le sentiment que vous êtes de ceux qui ont été préparés pour collaborer à cette aventure spirituelle, nous vous invitons à nous écrire afin de vous ENRÔLER comme membre de l’Union du Monde...»

Je vais envoyer cela à V en lui demandant innocemment: «Est-ce que cela a paru dans votre journal? Parce qu’il vaudrait mieux pas: nous ne faisons pas de propagande.» Oh! je les traite durement, tu sais!

Mais ça ne fait rien, il faut toujours avoir le sourire, mon petit. Finalement, c’est toujours le bien qui sort de tout cela – c’est un tri, tu sais! Un tamis épatant, épatant.

Au fond, il y a TRÈS PEU de gens qui sont prêts à être ici, très peu. On a pris toutes sortes de gens comme cela – on prend, on prend, on prend –, et après on tamise. Et le tri se fait de plus en plus. Au fond, on prend tout-tout, la terre tout entière, et puis on... tu sais, «churning» (Mère fait le geste de baratter), voilà. Et tout ce qui est inutile s’en va.

Et il est évident que l’opposition devient de plus en plus forte – ce qui est un très bon signe, cela veut dire que nous avançons. Mais les circonstances deviennent de plus en plus difficiles: la moindre chose est une occasion pour une démonstration de mauvaise volonté et de malveillance – de la part du gouvernement, de la part des gens, etc. –, c’est-à-dire que si l’on regarde d’un point de vue superficiel, nous sommes de plus en plus «dans le pétrin». Mais ça me réjouit le cœur! Je le prends comme un signe que nous approchons.

Et alors, il ne faut pas être affecté, n’est-ce pas, il faut toujours sourire. Sourire, être TOUT À FAIT au-dessus de tout cela, tout à fait.

(silence)

Je leur ai dit... Parce qu’ils m’ont demandé, à World-Union, quelle avait été leur faute (ils ne l’ont pas demandé aussi clairement mais d’une façon détournée) et je leur ai répondu (pas aussi clairement non plus, peut-être pas d’une façon détournée mais d’une façon plus générale), je leur ai dit que c’était d’avoir été infidèle. Et je leur ai expliqué que d’être infidèle, c’est de mettre tout sur le même plan (c’est là que j’ai eu l’occasion de leur envoyer cette phrase). Je leur ai dit: votre tort a été de dire: «Un enseignement parmi les enseignements; donc soyons larges d’esprit, admettons tous les enseignements.» – Alors on admet tous les enseignements et toutes les âneries possibles.

Mais, n’est-ce pas, si quelqu’un est pris comme ça, cela prouve que c’est un primaire et qu’il n’est pas prêt.

Oh! j’ai eu toutes sortes d’exemples... Toutes les erreurs sont des tests. Tu prends P, par exemple: pendant longtemps, quand quelqu’un venait du dehors et demandait à être éclairé, on l’envoyait chez lui (ce n’était pas moi qui les envoyais, mais on leur disait: «Allez donc parler à P»). Et P, c’est le sectaire par excellence! Il disait aux gens: «A moins que vous n’admettiez que Sri Aurobindo est LE SEUL qui sache la vérité, vous n’êtes bons à rien»! Naturellement (riant), beaucoup de gens se sont révoltés! Alors les autres (c’est toujours de la paresse, n’est-ce pas; pour ne pas se donner la peine de répondre aux gens ou de les voir, on dit: «Allez donc trouver celui-ci, allez donc trouver celui-là» – On se décharge du travail!), alors ils ont compris que ce n’était pas très habile et qu’il vaudrait peut-être mieux ne pas envoyer les visiteurs à P. Beaucoup de gens ont été rebutés comme cela. Mais au fond... On me l’a dit après, j’ai répondu: «Mais qu’ils lisent et qu’ils voient PAR EUX-MÊMES si ça leur plaît ou ne leur plaît pas. Qu’est-ce que cela peut faire qu’ils soient rebutés! – S’ils sont rebutés, cela veut dire qu’ils ONT BESOIN d’être rebutés! On verra après.» Il y en a qui ont fait un cercle et qui sont revenus. Il y en a qui ne sont jamais revenus – parce qu’ils n’avaient pas à revenir. C’est comme cela. Au fond, cela n’a AUCUNE importance. Ou encore, on peut dire les choses d’une autre manière: tout est parfaitement très bien.

(silence)

C’est chacun de NOUS qui doit apprendre sa leçon – ça, c’est différent; NOUS ne sommes pas parfaitement très bien parce que nous pouvons être mieux. Mais les circonstances sont juste l’épanouissement de ce que nous sommes, et rien d’autre. Et nous n’avons pas à nous tourmenter – moi, je ne me tourmente pas!

Et par-dessus le marché, ça m’amuse! Je trouve cela tellement rigolo! N’est-ce pas, il y a un moment où toutes ces choses-là sont si enfantines, si stupides, si... n’est-ce pas, meaningless[dépourvues de sens]. Qu’est-ce que ça peut faire! – Tant qu’on est là-dedans, on est là-dedans! Le jour où on sortira, on sourira aussi!

Naturellement, j’ai une sorte de responsabilité parce que l’on s’attend à ce que j’organise tout. Alors je tâche de mettre les choses À LEUR PLACE. Et c’est pour cela que je leur ai dit qu’il est préférable de ne pas tenir leurs «séminaires» ici, parce que ça a l’air... je n’ai pas dit «vénéneux», mais ça a l’air (riant) d’un champignon qui pousse sur le chêne! Voilà.

 

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Категория: Том 2 аудио | Добавил: Irik
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