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29.02.2016, 14:17 | |
1958.09.16
J’ai tout un stock de mantras, et qui sont tous venus spontanément, jamais de la tête. On dirait qu’ils jaillissaient, comme ça, comme on dit que jaillit le Véda. Je ne sais pas quand cela a commencé; il y a très longtemps, avant que je vienne ici. Certains sont venus ici. Mais pour moi, ils ont toujours été très courts. Par exemple, quand Sri Aurobindo était dans son corps, ici, à n’importe quel moment, dans n’importe quelle difficulté, pour n’importe quoi, ça venait toujours comme ça: «My Lord!» simplement et spontanément «My Lord!» Et ça établissait le contact instantanément. J’ai eu un mantra en français avant de venir à Pondichéry, c’était: «Dieu de bonté et de miséricorde»... Et c’était exprès, n’est-ce pas: je disais toujours «Dieu de bonté et de miséricorde», parce que je comprenais déjà, à ce moment-là, que tout est le Divin et que le Divin est en toute chose, et que c’est seulement nous qui faisons une distinction entre ce qui est Divin et ce qui ne l’est pas. Mon expérience est que, individuellement, on est en relation avec l’aspect du Divin, non pas nécessairement le plus conforme à notre nature, mais qui est le plus nécessaire pour notre développement, ou le plus nécessaire pour notre action. Pour moi, c’était toujours une question d’action, parce que, personnellement, individuellement, chaque aspiration du développement personnel avait sa forme propre, son expression propre, spontanée; alors je n’employais pas de formule. Mais dans l’action, dès qu’il y avait la moindre petite difficulté, ça jaillissait. Et ce n’est que très longtemps après que j’ai remarqué que la chose se formulait d’une certaine manière – je le disais sans même savoir quelle était la formule. Et la chose venait ainsi: «Dieu de bonté et de miséricorde.» C’était comme si je voulais éliminer de l’action tout aspect qui n’était pas celui-là. Et cela a duré pendant... je ne sais pas, plus de vingt ou vingt-cinq ans de ma vie. Ça venait spontanément. Tout dernièrement, quand le contact est devenu tout à fait physique, il y a eu une fois, comme ça, où tout le corps était dans une grande exaltation, et je me suis aperçue que, spontanément, d’autres formules s’ajoutaient à ce «Dieu de bonté et de miséricorde». Je les ai notées ce jour-là. Pour le moment, de toutes les formules ou mantras, ce qui agit le plus directement sur ce corps et prend toutes les cellules et tout de suite fait ça (geste vibrant), c’est le mantra sanscrit: AUM NAMO bhagavaté. Dès que je m’assois pour une méditation, dès que je suis une minute tranquille où je me concentre, ça débute toujours par ce mantra, et il y a une réponse dans le corps, dans les cellules du corps: elles commencent toutes à vibrer.
L’autre jour (c’était dans mon cabinet de toilette là-haut) c’est venu: ça a pris tout le corps. C’est monté comme ça: toutes les cellules tremblaient. Et avec une puissance! Alors j’ai tout arrêté, tout mouvement, et j’ai laissé la chose se développer; et la vibration allait en s’amplifiant, grossissant toujours, en même temps que le son lui-même s’amplifiait, s’amplifiait, et toutes les cellules du corps étaient prises d’une intensité d’aspiration... comme si tout le corps se gonflait – ça devenait formidable. J’ai eu l’impression que si je continuais, quelque chose allait arriver, dans ce sens qu’il y aurait un équilibre des cellules du corps qui changerait. Malheureusement je n’ai pas pu, parce que... je n’ai pas le temps, n’est-ce pas: c’était avant le balcon, j’allais être en retard, j’ai freiné. Et l’effet s’est interrompu. Mais il reste ceci, qu’à n’importe quel moment, si je répète ce mantra... tout se met à vibrer. Donc chacun doit trouver quelque chose qui ait son effet, individuellement. Moi, je ne parle que de l’action physique, parce que mentalement, vitalement, dans toutes les parties intérieures de l’être, l’aspiration prenait toujours, à chaque fois, sa forme spontanée. C’est seulement physiquement.
Le physique semble être plus ouvert à une chose qui se répète. Comme, par exemple, cette musique que nous jouons le dimanche, où il y a trois séries de mantras combinés. Le premier est celui de Chandi; il est adressé à la Mère universelle: Yâ dévî sarvabhoutéshou mâtriroupéna sansthitâ Yâ dévî sarvabhoutéshou shaktiroupéna sansthitâ Yâ dévî sarvabhoutéshou shântiroupéna sansthitâ Namastasyaï namastasyaï namastasyaï namo namah. Le second est adressé à Sri Aurobindo (et je crois qu’ils ont mis mon nom à la fin), cela comprend le mantra dont je parlais: Aum namo namah shrîmîrâmbikâyaï Aum namo bhagavaté shrîaravindâya Aum namo namah shrîmîrâmbikâyaï. Et le troisième est adressé à Sri Aurobindo: «Tu es mon refuge.» Shrîaravindah sharanam marna. Et chaque fois que cette musique vient, ça produit exactement le même effet à ce corps. C’est une chose curieuse: comme si toutes les cellules se dilataient, et on a l’impression que le corps va devenir plus grand... C’est tout dilaté, comme s’il était gonflé de lumière – de force, beaucoup de force. Et cette musique fait comme des volutes, comme si c’était de la fumée d’encens lumineuse, blanche (pas transparente: vraiment blanche)…
Alors, pour ces mantras, cela dépend de ce que l’on veut. Je suis en faveur d’un mantra court, surtout si on veut faire des répétitions très multiples et en même temps spontanées – un, deux mots, trois mots tout au plus. Parce qu’il faut qu’on puisse s’en servir dans tous les cas, quand il va arriver un accident, par exemple. Il faut que ça jaillisse sans qu’on y pense, sans qu’on appelle: que ça sorte spontanément de l’être, comme un réflexe, tout à fait comme un réflexe. Alors le mantra a sa pleine valeur.
Pour moi, les jours où je n’ai pas de préoccupations spéciales, ou de difficultés spéciales (des jours que je pourrais appeler normaux, où je suis normale), tout ce que je fais, tous les mouvements de ce corps, toutes, toutes les paroles que je prononce, tous les gestes que je fais, sont accompagnés et comme soutenus, ou doublés de ce mantra: Aum namo Bhagavaté... Aum namo Bhagavaté... tout, tout le temps, tout le temps, tout le temps. Ça, c’est l’état normal. Et ça crée une atmosphère d’une intensité presque plus matérielle que le physique subtil; c’est comme-presque comme des effluves de médium. Et ça a une grande action, très grande action: ça peut arrêter un accident. Et ça accompagne tout le temps, tout le temps. Alors voilà, c’est à savoir ce que tu veux en faire. C’est pour garder l’aspiration – pour se souvenir. On tombe tellement facilement dans l’oubli. Pour créer une espèce d’automatisme. Tu n’as pas de mantras qui te soient venus, qui te donnent une impression plus vivante?... Leurs mantras sont longs? Leurs mantras sont longs et il1 ne m’a donné aucun mantra de la Mère, alors... Il y en a, mais il ne me les a pas donnés... Je ne sais pas, cela n’a pas beaucoup d’effet sur moi, c’est quelque chose de très mental. C’est pour cela qu’il faudrait que ça jaillisse de toi. (silence) Cette chose est venu à moi au bout d’un certain temps, parce que je me disais... enfin je voyais, je voulais avoir un mantra qui soit le mien, c’est-à-dire qui soit en conformité avec ce que ce corps a à faire dans le monde. Et c’est à ce moment-là que c’est venu.2 C’était vraiment une réponse à un besoin qui s’était fait sentir. Alors si tu sens le besoin – pas là, dans ta tête, mais ici (Mère désigne le centre du cœur), ça viendra. Un jour, ou bien tu entendras les mots, ou bien ils jailliront de ton cœur... Alors ça, il faudra le garder.
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