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23.12.2019, 11:54 | |
1963.09.25 (1)
(Mère commence par lire la notation d'une expérience récente:) C'est venu en anglais (je veux le mettre dans le Bulletin pour boucher un trou!) Il faut que ce soit mis en français aussi. Love is... (inutile de dire que c'est la condensation d'une expérience – d'une expérience dont je ne parle pas). Love is not sexual intercourse. Love is not vital attraction and interchange. Love is not the heart’s hunger for affection. Love is a mighty vibration coming straight from the One. And only the very pure and very strong are capable of receiving and manifesting it. Puis une explication sur ce que j'entends par «pur», the very pure and very strong [le très pur et le très fort]: To be pure is to be open only to the Supreme's influence, and to no other. Beaucoup plus difficile que ce que les gens considèrent comme la pureté! qui est tout à fait artificiel, et faux. La dernière phrase, je l’ai aussi en français (les deux sont venus ensemble): «Être pur, c'est être ouvert seulement à l’influence du Suprême et à nulle autre.» C'est simple et réglé.
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J'ai tout un paquet de petits papiers! (Mère montre ses successives ébauches de traduction) C'est une chose nouvelle pour moi. C'est ce que je te disais l’autre jour: d'abord une expérience, mais une expérience... quelque chose qui PREND l’être, tout le corps, tout-tout, comme ça (geste de saisissement) et qui vous tient. Et ça travaille. Ça travaille partout dans les cellules: partout-partout, dans la conscience, dans la sensation, dans les cellules. Puis il y a comme une décantation, comme si ça se tamisait à travers quelque chose de très fin, et ça retombe de l’autre côté – en mots. Mais pas toujours organisés en phrases (c'est très curieux): deux mots ici, trois mots là (Mère montre comme des taches de couleur ici et là). Puis je reste bien tranquille, je ne bouge pas – surtout pas penser, pas bouger, silence. Alors, petit à petit, ces mots font une danse, et quand ça commence à faire une phrase un peu cohérente, j'écris. Mais généralement ce n'est pas final. Si j'attends encore un peu (même en faisant autre chose), au bout d'un moment, ça vient: une phrase qui a une existence beaucoup plus logique et plus frappante. Et si j'attends encore, ça se précise; et finalement ça vient avec l’impression: «Maintenant, c'est ça.» Pour l’anglais, c'est ce qui s'est produit: «Maintenant, c'est ça.» – Bon, alors j'écris. Jamais je n'avais cela avant. Il a fallu que tout se taise (je veux dire même le mental extérieur le plus actif, le plus matériel), il a fallu que je prenne l’habitude, quand mon expérience vient, de ne pas bouger, pas bouger – rien ne bouge, ça reste comme ça (geste suspendu) et ça attend. Et même visuellement, il y a l’impression d'une petite pluie de lumière blanche; cette petite pluie, au bout d'un certain temps, c'est comme si elle faisait pousser des mots! comme si elle arrosait les mots! – les mots arrivent. Puis ça fait une sorte de danse, un quadrille, et quand le quadrille est bien formé, alors la phrase devient claire. C'est très amusant! C'est déjà la troisième fois que ça arrive – tout nouveau. Alors quand je note, ça fait toutes sortes d'écritures! (Mère montre le paquet d'ébauches) Et maintenant, avec ce nouveau procédé, les écritures vont se multiplier! parce que ça vient comme je te l’ai dit (par petits morceaux successifs). Mais ça a un avantage: le mental reste absolument silencieux – le mental n'a rien à faire, c'est comme quelqu'un qui vient chercher des mots dans un magasin et qui fait tous les arrangements. Et ce quelqu'un est impersonnel; c'est une conscience impersonnelle; c'est presque «la conscience de ce qui veut s'exprimer», la conscience d'une révélation ou la conscience d'une instruction ou la conscience d'une volonté, mais ce n'est pas une personne. Il ramasse les mots et il les met ensemble, puis il y a une danse... comme une danse d'électrons! (silence) l’autre jour, le processus était moins complet mais c'était quelque chose d'analogue, un commencement: K m'avait envoyé un article qu'il voulait publier quelque part avec des citations de Sri Aurobindo et de moi, et il voulait être sûr que c'était correct, qu'il n'avait pas fait une bouillie (!) et à un endroit, j'ai vu un commentaire de lui (tu sais l’amusement des jeux de mots quand on est tout à fait dans le mental: le mental aime faire des jeux de mots et des oppositions de phrases), c'était en anglais, je ne cite pas, mais il disait que «l’âge des religions était l’âge des dieux»; alors naturellement, notre mental, ce monsieur, aime beaucoup les jeux de mots, et il lui a fait dire que, maintenant, ce n'était plus l’âge des dieux, c'est «l’âge de Dieu» – c'est-à-dire qu'il retombait lamentablement dans la religion chrétienne... sans s'en apercevoir! Et j'ai vu, en même temps que sa phrase écrite, j'ai vu cette espèce de tendance du mental, qui aime ça, qui trouve ça très... oh! c'est charmant, c'est tout à fait bien tourné (!) Je n'ai rien dit, j'ai continué, j'ai fini son article. Puis à l’endroit où il y avait cette phrase, j'ai vu une petite lumière qui brillait: c'était comme une petite étincelle (je vois avec les yeux ouverts); j'ai regardé mon étincelle, et, à la place de God, il y avait The One [l’Un]. Alors j'ai pris ma plume et j'ai corrigé. Mais ma première traduction était The All-containing One [l’Un qui contient tout], parce que c'était une expérience, pas une pensée. Ce que j'ai vu, c'était The One containing all. Et moi, innocemment, je l’ai écrit sur un papier (Mère montre un petit bout de papier): The All-containing One. Et juste à ce moment-là, j'ai vu comme quelqu'un qui était en train de me donner une gifle et qui me disait: «Ce n'est pas ça: il faut mettre The One, c'est tout.» Alors j'ai écrit The One. C'est comme cela que ça fonctionne! C'est vraiment la pensée vue d'en haut, de dessus, et c'est très amusant. C'est très amusant, tout ça joue, c'est comme des petits feux-follets qui sortent d'ici, là, qui font une danse, qui s'arrangent – c'est très amusant. Ça commence à être amusant. C'était très fort ces jours-ci: c'était la nuit, c'était le jour, c'était tout le temps. Mais la nuit d'avant, j'étais avec Sri Aurobindo, qui m'a fait une révélation. J'étais avec lui, il était reclining (pas couché mais sur une espèce de chaise-longue) et je devais lui apporter quelque chose à prendre (ce n'est pas du tout comme de la nourriture physique, c'est quelque chose d'autre... je ne sais pas ce que c'est... c'est assez différent dans ce monde-là: c'est le physique subtil), et alors ça s'est traduit... (il n'y avait pas de mots dans ma conscience; je ne sais pas pourquoi, il n'y avait pas de mots!), il m'a dit quelque chose, que j'ai parfaitement compris, et non seulement compris mais j'étais très contente, il y a eu une joie en moi, et je lui ai répondu: «Oui, justement! ça correspond à l’expérience que j'ai eue aujourd'hui et qui est...???» (Mère reste en suspens). N'est-ce pas, j'étais consciente pendant que j'avais toute l’activité, mais ça se traduit par des mots, et puis les mots (là-bas) ne sont pas les mots (ici), je ne sais pas comment faire! Et il me disait avec le ton que l’on prend quand on exprime une expérience définitive et formidable (il avait un ton d'une puissance absolue), quelque chose qui s'est traduit comme cela: Now, the nourishment (ce n'était pas «nourishment», c'était food) comes from the whole of Nature at once [Maintenant, la nourriture vient de toute la Nature en même temps] (Mère prononce ces paroles comme une énigme, ou comme un Sésame qui n'a pas encore ouvert la porte), et il me disait de lui apporter (ça aussi, c'était une traduction): Yes you will bring it (le it était ce «food coming from the whole Nature at once» – c'est une transcription qui paraît idiote, mais enfin...) you will bring it in this translucent bowl [Oui, vous apporterez la nourriture dans ce bol translucide]. Et alors moi, je lui disais: Yes, I knew, I knew that I had to use this translucid bowl to bring you the food... [Oui, je savais, je savais que je devais prendre ce bol translucide pour vous apporter la nourriture]. Mais à quoi ça correspond??... Mais c'était si évident! il y avait une telle joie! (parce que, comme j'étais consciente, je me disais: «Tiens, tout de même, je le suis encore bien dans son développement; ça continue à être comme quand il était ici: quand il a remporté une victoire, elle se traduit en moi.») Donc j'étais tout à fait consciente, et je lui ai dit : Ah! I am glad... (je bafouille, n'est-ce pas, ce n'était pas du tout ça – c'était admirable) oh! I am glad, I knew that I had to bring you the food in this translucid bowl... [Oh! je suis contente, je savais que je devais vous apporter la nourriture dans ce bol translucide]. Et le «translucid bowl» était une merveille! Je l’avais, n'est-ce pas, c'était beau! C'était comme un verre opalin, vivant, tout lumineux, mais où toutes les lumières étaient vivantes, bougeaient, et il y avait des couleurs!... des roses, des mauves, des argents, des ors, oh! c'était beau comme tout. Et je lui apportais ça. Ça m'a laissé une très forte impression. Très forte: j'étais under a spell [subjuguée, fascinée], probablement parce que l’expérience était encore trop forte, trop puissante pour le cerveau matériel. Et j'ai bien vu tout de suite; au moment même, j'ai vu que c'était une transcription, et une transcription d'une pauvreté extraordinaire, mais il n'y avait pas mieux à faire. Et alors des détails!... Il y avait toute une histoire (ça a duré encore plus d'une heure et demie)... tous les détails. Parce que j'étais avec lui à un étage supérieur, puis je suis descendue et j'ai vu des gens, j'ai fait des choses, etc. C'était à l’étage d'en haut. Et tout cela se passait dans une lumière éblouissante-éblouissante-éblouissante; tout était comme dans un plein soleil... beaucoup plus brillant que le soleil – le soleil est sombre dans ces cas-là. Et alors quand je suis descendue (ce n'était pas comme ici: chacun avait sa maison dans son jardin, c'était une immense propriété), je suis allée tout droit à ma salle de bains; j'ouvre la porte... et je trouve là-dedans quelqu'un (que j'ai reconnu, que je ne nommerai pas) qui était en train de s'en servir – ah! je me suis dit: ça va bien!... J'ai refermé la porte. Toutes sortes de détails, ça a duré plus d'une heure. Et tu sais, une heure et demie de nuit, tout ce qui peut se passer... J'étais encore grande – je suis toujours grande. Mais je n'étais pas habillée comme je le suis d'habitude: j'avais une robe courte. Et il y avait des tas de gens; j'ai reconnu tout le monde, j'entendais les voix, c'était très-très distinct; et il y avait deux filles (pas filles, ce sont des femmes maintenant, mais c'étaient pour moi comme des filles), deux filles qui parlaient et qui disaient: «Comme ses jambes sont fortes!» (c'est symbolique). Et alors, en même temps, j'ai vu mes jambes, comme s'il y avait un miroir là pour me montrer mes jambes! Et j'avais une robe courte et je voyais mes jambes, mes deux pieds qui étaient chaussés – des pieds chaussés. Et une robe courte. Très active. Voilà. (silence) La nuit dernière, c'était moins agréable... Encore il y avait ces écroulements. J'étais en bas, n'est-ce pas, et je voulais remonter chez moi, et chaque fois que je voulais remonter, tous les moyens disparaissaient ou s'abolissaient. Maintenant j'ai chassé tout ça parce que c'était fatigant. Mais je me souviens d'une chose: je montais une sorte de... ce n'était ni un escalier ni une échelle, c'était quelque chose de très bizarre; c'étaient comme des blocs de pierre rouge foncé, et tout ça tombait en morceaux – ça tombait. J'ai fini par être ennuyée, et il y a eu un mouvement, pas de colère mais de volonté qui s'affirme – et tout a disparu... On sent que ce sont des formations adverses qui essayent de vouloir harasser, jusqu'au moment où, je ne peux pas dire que je perds patience mais quelque chose se fâche (est-ce «se fâche»? ou s'affirme: «Ah non! assez!») et imédiatement, pfft! tout s'en va. Et alors je me suis trouvée sur un chemin que je connaissais très bien, mais avec une foule! Une foule, une foule: c'étaient toutes les écoles du monde qui venaient en vacances là. Et il y avait des troupes de gosses conduites par des matrones, des professeurs, et il y en avait, il y en avait.... Et puis des enfants qui s'arrêtaient, qui jouaient par terre; mais tous ces enfants me connaissaient très bien, et quand j'arrivais, ils enlevaient leurs affaires pour me laisser passer – des petits bouts de gosses grands comme ça. Puis j'ai rencontré une personne symbolique (qui n'est pas une personne humaine), que je connais très bien, qui était bleu pâle (c'est-à-dire un être du mental supérieur, une force de la Nature dans le mental supérieur), que je connais très bien, elle est très souvent près de moi; et alors elle m'expliquait ses difficultés et je lui expliquais ce qu'il fallait faire; je lui disais: «Je t'ai déjà dit ça plusieurs fois, c'est comme ça et comme ça...» Elle est restée à côté de moi pendant très longtemps, et elle me disait: «Pourquoi suis-je toujours obligée de te quitter?» Je lui ai répondu: «Ne te fais pas de soucis; maintenant tout est bien.» Ça a duré très longtemps. Mais c'était intéressant, un contact très agréable, très raffiné: une belle fille – c'est-à-dire une belle pensée, une belle idée. C'était une belle fille. Et elle avait la responsabilité d'une quantité innombrable de petits enfants (Mère rit), alors elle était quelquefois un peu ennuyée et je lui expliquais ce qu'il fallait faire. Je sens une sorte de tendresse pour cette personne. Et tous ces enfants! même les tout petits qui ne pouvaient presque pas marcher, quand ils me voyaient arriver, ils tiraient leurs jouets de côté, ils faisaient place nette pour que je passe. Ce n'était pas par terre, ce n'était pas dans le monde physique. Mais une nuée, n'est-ce pas!... C'est certainement un monde mental quelconque. (silence) Mais cette expérience-là (les marches qui s'écroulent), je sais à quoi ça correspond, parce que je sais quelle était mon expérience quand je me suis endormie: c'est toujours quand je suis en présence du Problème... On peut traduire (mais ça le réduit beaucoup): «Pourquoi le monde est-il comme il est?» Alors il me vient cette espèce de... c'est un état de compassion AIGU – aigu, presque douloureux – pour l’état du monde et de l’humanité. Quand c'est comme cela, j'ai ces difficultés la nuit. Et alors je demande, je veux savoir le VRAI secret – pas tout ce que les gens ont raconté (tout ce qu'ils ont dit me paraît juste comme une histoire pour... pour consoler les enfants), mais la VRAIEchose. Quand j'entre dans le repos profond avec cette tension, alors ça se traduit toujours par ces écroulements: je veux grimper et pfft! pfft! pfft! tout le temps, tout le temps, tout s'écroule sous le poids de mon ascension. Jusqu'au moment où je vois cette mauvaise volonté qui veut m'empêcher de trouver ce que j'ai à trouver, alors je me fâche, et ça s'arrête imédiatement – «fâche», est-ce que c'est le mot? Je ne sais pas: je refuse, je refuse la situation. Alors elle saute. Et je me réveille en me disant: «Tu vois, tant que tu acceptes, tu ne peux pas savoir, tu ne sais pas; quand tu refuseras vraiment, tu sauras.» Alors je réponds: «Quand le Seigneur voudra que je sache, je saurai; quand il sera nécessaire que je sache, je saurai.» Pour le moment probablement... C'est comme le «bol translucide» de Sri Aurobindo... Il n'y a rien qui corresponde à ça. Au fond, on veut toujours aller trop vite. Mais c'est parce que tous les gens pensent avec la notion du temps – ils sont harassants.
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